Je suis né à Lakota, mais la plus grande partie de ma vie s’est déroulée à Agboville, ville dans laquelle j’ai fait mes études primaires et secondaires. Avant 2012, mes passages à La perle des lagunes n’étaient que de courte durée. En octobre 2012, alors que j’avais décroché le baccalauréat quelques mois plus tôt, je me suis installé à Abidjan en vue d’y poursuivre mes études universitaires à l’Université Catholique de l’Afrique de l’Ouest (UCAO). J’habitais dans la commune de Yopougon alors que mon université se situait à Cocody. Le long trajet et les embouteillages interminables faisaient de mon chemin un véritable calvaire, tant les pertes de temps et d’énergie étaient à leur paroxysme. J’ai donc décidé de rechercher une résidence aux alentours de l’université ou du moins dans la commune de Cocody. À cette fin, je pris des recommandations auprès de certains amis, et l’un d’entre eux me parla des appartements du Centre Culturel Comoé.

« Comoé ? Ce nom ressemble étrangement à celui du fleuve. » Me suis-je dis la première fois. En arrivant au centre, tout le monde avait une attitude peu commune : une bonne humeur perceptible à des kilomètres, un sourire permanent et une envie de communiquer la joie de vivre. Je me suis évidemment demandé s’ils avaient reçu la consigne de se comporter de la sorte en voyant de nouvelles personnes. Cela dit, je m’y plaisais quand-même et je continuai donc à fréquenter le centre. Avant que je m’en rende compte, je suis devenu un des leurs. Moi qui m’étonnais du fait que le centre portait le même nom que le fleuve, je pouvais désormais affirmer avoir été emporté par le courant. C’est une joie contagieuse qui et un désir incontrôlable de tout faire pour le mieux et en se penchant sur les moindres détails et en pensant aux autres.

Étant étudiant en droit, je me suis engagé au centre d’étude de droit (CED), qui est l’association regroupant les étudiants en droit du centre. Avec mes ainés, j’ai appris à développer ce goût du travail bien fait en se penchant sur les détails. Je me souviens particulièrement des réunions interminables qui précédaient nos activités. L’optimisme et l’abnégation de certaines personnes n’ont cessé de m’impressionner. Nous avons organisé des activités avec des budgets dont nous ne possédions même pas le dixième quelques mois avant. Et quelle était la grande motivation de tout ça ? Les besoins des étudiants qui, malgré les grèves incessantes, devaient aller de l’avant, qui devaient continuer à grandir sur tous les plans. Nous devions faire ce que nous pouvions en pensant à l’avenir de ces personnes, mais aussi à celui de notre pays. Il fallait avoir assez de maturité et responsabilité pour être à agir de manière désintéressée. Arrivé aux hautes instances de l’association, j’ai tenté de transmettre à ma manière ces valeurs à mes cadets.
Et aujourd’hui encore, je peux voir que ces derniers en font de même. C’est un courant sans fin, un courant qui ne donne aucune envie d’y résister, mais face auquel, au contraire, tout le monde a envie de se laisser emporter. C’est le COURANT DU FLEUVE COMOÉ.

AKÉ Tchimou Yannick Kévin

Doctorant en droit (Université de Montréal)