FOI ET SCIENCES : POURQUOI TUER GALILEE ?
C’est sur cette interrogation que s’est ouverte la session 2022 des cours de théologie « Foi et monde contemporain » donnés par l’abbé Landry GBAKA-BREDE au Centre Culturel Comoé, le vendredi 28 février
Il y a beaucoup d’imaginaire sur ce cas : selon une enquête du Conseil de l’Europe réalisée il y a quelques années parmi les étudiants en sciences de tous les pays de la Communauté, environ 30 % d’entre eux ont la conviction que Galilée fut brûlé vif par l’Église. Presque tous (97 %) sont convaincus qu’il a été torturé. Ces chiffres ne sont pas loin de ceux enregistrés à Comoé…
Or il n’en n’est rien. Galilée est mort à 78 ans, dans son lit, sans avoir passé un seul jour en prison ni avoir été torturé, avec l’indulgence plénière et la bénédiction du Pape. C’était le 8 janvier 1642, neuf ans après sa « condamnation ».
Que s’est-il réellement passé ?
La controverse tournait autour de l’œuvre de Nicolas Copernic (1473-1543), astronome polonais catholique et peut être prêtre. Copernic sur la demande de ses amis, publia un livre sur ses théories astronomiques, dédié au Pape Paul III en 1543 dans lequel et en contradiction avec le système de Ptolémée (géocentrisme), il affirmait que le soleil était au centre de l’univers et la terre et les planètes tournaient autour (héliocentrisme). Malgré les attaques des protestants contre cette théorie qui réfutait les Écritures, disait-on, le système copernicien ne fut jamais objet de censure formelle de la part des catholiques jusqu’à l’avènement de Galilée (1564-1642).
En effet, Galilée, grâce aux lunettes astronomiques qu’il construisit détecta des montagnes sur la lune et 4 satellites de Jupiter. Ce qui prouvait qu’une planète ne laissait pas ses satellites quand elle était en mouvement. Ce travail fut au début accueilli et loué par certains ecclésiastiques dont le père Christophe Clavius qui confirma cette découverte au télescope fin 1610. De plus, en 1612 Galilée publie ses « Lettres sur les taches solaires », dans lesquelles il défendait pour la première fois sous forme imprimée le système copernicien. Il reçut une lettre de félicitations du cardinal Maffeo Barberini, futur pape Urbain Vlll.
Or l’Église acceptait le modèle de Copernic comme une hypothèse. Galilée considérait qu’il était certain, mais sans preuves valides pour le confirmer et il proposa une réinterprétation de certains versets de la Bible. L’Eglise à cette époque était sensible aux accusations des protestants selon lesquelles les catholiques ne montraient pas le respect dû à la Bible. Elle ne vit pas d’un bon œil l’insinuation que le sens littéral des écritures, où l’on présentait parfois la terre comme un corps immobile, devait être laissé de côté pour s’accommoder à une théorie non encore démontrée. C’est ainsi qu’en 1616 Galilée accepta cependant de continuer son travail en admettant la théorie de Copernic comme hypothèse.
Mais en 1632, dans son « Dialogue sur les grands systèmes du monde » il présenta de nouveau la théorie de Copernic comme une certitude. Ainsi en 1633 il fut déclaré hérétique avec interdiction de divulguer la théorie copernicienne. Il ne passa pas un seul jour en prison. Il fut pendant quelque temps assigné à résidence et ne garda que l’obligation de réciter une fois par semaine les 7 psaumes pénitentiels pendant 3 ans. Les 3 années passées, il continua, en tant que croyant, à les réciter jusqu’à sa mort.
Enfin, en 1741 devant la preuve optique du mouvement de la terre faite par Bradley, le pape Benoît XIV fit donner l’imprimatur (l’autorisation de publication) à la première édition des œuvres complètes de Galilée. Et le 31 octobre 1992, le pape Jean-Paul II a reconnu clairement, lors de son discours aux membres de l’Académie pontificale des sciences, les erreurs de certains théologiens du XVIIème siècle dans l’affaire ptoléméo-copernicienne.
C’est sur ces notes que prit fin la séance du jour au grand bonheur des participants, soulagés sans doute de ne pas avoir à porter la responsabilité du meurtre de Galilée. Une dernière curiosité : c’est seulement la légende qui a attribué au génial Galilée la fameuse phrase « Eppur si muove » (Et pourtant elle tourne).
Noël Camara, Master 2 Biologie
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